Lorsque comme chrétien, je me pose la question de ce que je peux apprendre des Juifs sur l’Ecriture, c’est avec l’entière conscience du manque total d’écho que cette question a éveillé jusqu’à une époque avancée dans la théologie et la foi chrétiennes. Au cours de l’histoire bientôt bimillénaire de l’Eglise, les Juifs ont toujours été, aux yeux des chrétiens, des hommes ayant une compréhension « ancienne» et dans l’ensemble dépassée, de la foi et de l’Ecriture. Il s’agissait donc d’amener ces gens par tous les moyens — de la persuasion à la force, s’il le fallait, en passant par la pression économique et sociale — à la vraie foi et à la reconnaissance de Jésus comme le Messie. Il était impossible aux chrétiens de concilier les objectifs d’une mission mal comprise avec une attitude d’écoute. Même après la tragédie de notre siècle qui a coûté à l’Europe la plus grande partie de ses Juifs, peu de tentatives ont été faites, à ma connaissance, pour prendre les Juifs au sérieux au-delà du niveau purement humanitaire, sur le terrain même de leur judaïsme, c’est-à-dire de leur manière de croire et de vivre. Certes on regrette la tragédie et on la compense par une sympathie superficielle pour l’Etat d’Israël. Mais peu de chrétiens se soucient de savoir qui sont vraiment les Juifs et quelle est la force qui les a aidés — et continue de les aider à survivre.