Alexandre Vinet est devenu historique — et cela n’est guère inhabituel dans l’histoire — à mesure que la grande édition de ses œuvres, celle de la Société d’édition Vinet, s’est progressivement achevée. Aujourd’hui, l’édition étant terminée, Vinet semble être plus ou moins tombé dans l’oubli1. Comment l’expliquer? Il y a à cela plusieurs raisons. L’une des plus évidentes est que le nom de Vinet est, à tort ou à raison, lié à celui de l’Eglise libre du Canton de Vaud. Mais celle-ci a fusionné en 1966 avec l’Eglise cantonale. Ainsi, l’Eglise libre du Canton de Vaud a achevé son rôle historique — et avec elle, semble-t-il, son docteur et père, Alexandre Vinet. En réalité, on sait bien que les rapports de Vinet avec la jeune Eglise libre ont été assez compliqués et que l’Eglise libre, telle qu’elle est devenue dans l’histoire, n’a pas été tout à fait conforme aux idées de Vinet. Mais, aussi compliqués et même contradictoires qu’aient été les rapports de Vinet avec l’Eglise libre, c’est incontestablement lui qui a insisté pendant toute sa vie sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et qui ainsi a justifié d’avance la naissance d’une Eglise séparée non pas seulement de l’Etat, mais tout autant d’une Eglise qui demeure plus proche de l’Etat, c’est-à-dire de l’Eglise nationale.