Ce survol de la philosophie française depuis 1945 jusqu’à aujourd’hui ne se cachera pas d’être apologétique, au sens où la théologie qui témoigne de Dieu répond toujours à la philosophie qui cherche à écouter et à parler l’homme et le monde. Mais cette réponse est indirecte. Elle ne se saisit pas de la philosophie comme d’un cadavre qui attendrait sa guérison et son illumination de la foi. Elle regarde plutôt le chemin propre, autonome, que vit la philosophie. Selon que Dieu y est conçu comme un obstacle à dissoudre, comme un symbole à interpréter anthropologiquement ou comme une éventualité et une altérité à souhaiter, comprendre et attendre théocentriquement, la théologie apprend de la philosophie le moment où la parole trouve son lieu: lieu tantôt à défendre contre les maléfices et les insignifiances que la philosophie lui suppose, tantôt à préciser, corriger, remplir, si la philosophie en use selon des partialités qui à la fois l’expriment et le dénaturent. Je conçois donc l’apologétique comme la cartographie du lieu des propositions théologiques, plus étymologiquement dans apologia, de ses paroles en retour, mais non pas comme un ajustement des solutions théologiques aux apories philosophiques. Car ce qui est attestatif dans l’ordre de la confession réfléchissante n’est jamais démonstratif dans l’ordre du concept, ni du désir. Que l’homme éprouve le besoin de se délivrer des transcendances encombrantes et vaines ou qu’il aspire au contraire à un décentrement transcendantal ne rend le Dieu que confesse la foi ni plus menacé, ni plus probable. Il faut respecter les ordres de la connaissance. L’apologétique n’aménage pas des lieux pour le retrait ou pour la réapparition du Dieu de la théologie. Elle discerne seulement comment le Dieu vivant parle autrement selon les lieux que fréquentent les insistances humaines.