Etudiant chez Pannenberg au moment même où parut son «Offenbarung als Geschichte», j’ai vécu intensément la provocation que cette voix représentait dans une situation d’apparente impasse. Pour des raisons qui tiennent à ma trajectoire théologique et personnelle, je suis peu à peu devenu un admirateur intrigué, regardant avec une suspicion croissante la construction pannenbergienne, certes passionnante mais trop souvent spéculative.
Or, le livre de Denis Müller, thèse de doctorat présentée à l’Université de Neuchâtel, remet tout ce débat en chantier et me l’a fait revivre, faisant de surcroît connaître Pannenberg au public francophone. En effet la christologie est la seule partie de l’œuvre de Pannenberg à avoir été traduite en français ; et les études consacrées à ce théologien font défaut dans cette langue. Son type de pensée n’y est certainement pas pour rien. L’audience que ce théologien (et philosophe) allemand a reçue dans le monde anglo-saxon (fondamentalistes, néo-libéraux, process-theology) et dans le catholicisme en est par contre d’autant plus grande. Le travail critique de Denis Müller, présentation, analyse et confrontation à partir d’un point de vue extérieur, comble donc une lacune de la théologie française dans ce grand débat autour de «vérité et histoire». Il faut d’emblée saluer cette étude et remercier l’auteur pour la peine qu’il a prise de nous expliquer ce théologien, peut-être au risque de l’anachronisme, vu la manière dont Pannenberg aborde cette problématique. Denis Müller, par ailleurs, n’hésite pas à affirmer sa propre position, et on commence à entrevoir dans la théologie suisse romande une palette de plus en plus riche et variée de systématiciens. [D. MÜLLER, Parole et Histoire, Genève, Labor et Fides, 1983].