La question de Dieu revient, insistante. On avait dit Dieu mort, et voilà qu’il semble renaître. Les raisons en sont multiples. Disons, pour faire court, qu’elles ne sont pas sans liens avec le surgissement d’une conscience plus critique que naguère (et parfois malheureuse) à l’égard de l’aventure moderne. Si certains « théologiens de la mort de Dieu » semblaient avoir épousé les thèses « aufklärerisch » de l »‘homme adulte » pour lequel Dieu n’a tout simplement plus place1, on est aujourd’hui convié à ouvrir un procès culturel et politique: un procès de civilisation. L’homme qui, depuis Descartes, avait pensé assurer ses pouvoirs à partir de lui-même découvre que ses œuvres se retournent contre lui. U avait cru conquérir la liberté en congédiant un Dieu jugé trop dominateur; il n’a pu que nourrir les germes d’un totalitarisme consommé comme jamais. On voit ainsi la civilisation industrielle bourgeoise, étatique et technologique, et le socialisme être accusés du même crime (le second apparaissant n’être en profondeur que le prolongement fatal du premier). La « nouvelle philosophie » dont on a fait si grand cas au printemps 1977 fournit l’exemple le plus frappant de cette conjoncture.