Auteur d’une œuvre déjà considérable, le professeur Michel Villey vient d’enrichir de manière précieuse la philosophie juridique de langue française avec son Précis de Philosophie du Droit. Le genre auquel ressortit l’ouvrage, dont le premier tome paru en 1975 vient déjà de connaître une réédition revue et corrigée et dont le deuxième tome est annoncé pour 1979, ne doit pas faire illusion. C’est bien plus qu’un manuel de vulgarisation qu’a conçu le fondateur des Archives de Philosophie du Droit; c’est une œuvre de synthèse, destinée à faire le point, dans la perspective historico-dogmatique qui lui est propre, de sa philosophie juridique, qui n’est autre que «la philosophie du Droit romaine-aristotélicienne» (p. 101). L’auteur annonce d’ailleurs d’emblée la couleur, puisqu’à l’art. II, qu. III de ses Prolégomènes — on appréciera la coquetterie scolastique —, réagissant sous la rubrique De la mode en philosophie (p. 36 ss.) contre «le préjugé chronolâtrique» qui imprègne la pensée occidentale, il marque ostensiblement, a l’encontre de l’idée de progrès en philosophie, sa préférence pour l’hypothèse d’«une régression de la philosophie» (p. 39). « Précisément la plus malade des philosophies semble la philosophie du Droit» (p. 40), poursuit-il, décelant comme un de ses symptômes les plus révélateurs la prolifération des philosophies juridiques qui apparente «les congrès de l’Association internationale de philosophie du Droit » à la « pire Tour de Babel » (p. 41 Le mal est donc grave pour Michel Villey, d’autant plus grave que juristes et philosophes s’ignorent superbement, les premiers s’étant «jetés dans une sorte de technicisme à l’américaine», qui rend la philosophie inutile (p. 3-4), les seconds donnant «dans les sciences sociales à la mode — politique, sociologie, histoire scientifique, marxisme… » (p. 3). [Michel Villey, Précis de philosophie du droit, Paris, Dalloz, 1975]