Il peut paraître étonnant qu’au moment où les théologies de la libération font tant parler d’elles, la Black Theology, elle, n’éveille que peu d’intérêt, en tout cas en milieu francophone. Il faut dire que depuis la mort, l’emprisonnement, ou l’expulsion des Etats-Unis de tous les leaders noirs- américains, la situation raciale en Amérique du Nord — en apparence du moins — n’est plus d’actualité. Pourtant, le courant théologique, issu des Eglises noires et des universités au milieu des années 60, s’est révélé très rapidement être extrêmement fécond. En effet de 1966 à 1979, ce nouveau mouvement s’est signalé à l’attention publique en osant affirmer que le langage de la blackness était le meilleur langage symbolique sur Dieu à tenir dans le contexte nord-américain. La confession d’un Dieu noir a entraîné de multiples questions et a conduit les théologiens à repenser le problème de la révélation et celui du rapport entre particularité et universalité. C’est ainsi que s’est développé le thème de la blackness de Dieu dont découlent des réflexions tant christologiques qu’anthropologiques noires. Cette nouvelle théologie contextuelle lance donc un défi aux autres théologies: elle leur rappelle que le christianisme s’est trop longtemps fait l’allié des structures d’oppression et que par conséquent, l’appel de Dieu à l’homme moderne ne peut qu’entraîner un combat à la fois théologique et politique ne se limitant plus au domaine des idées, mais englobant celui du vécu.