Le Tractatus de Primo Principio de Jean Duns Scot est un traité de très haute tenue métaphysique, dont le projet est de montrer, si ce n’est de démontrer, qu’il existe un premier principe, Dieu, qui est l’origine, la fin et l’archétype unique et infini de tout ce qui est. Il est le premier principe à qui convient le Nom béni qu’il s’est attribué lui-même: «Je suis celui qui est».
Un esprit exercé à la dialectique serrée de Duns Scot reconnaîtra d’emblée que les troisième et quatrième chapitres sont presque littéralement empruntés au Commentaire des Sentences; il n’empêche que le Traité se présente sous une forme renouvelée et originale dans l’ensemble de la production scotiste, voire dans l’ensemble du Moyen Age; plusieurs traits ne manquent pas d’en souligner l’originalité: l’unité organique du texte, l’esprit qui le porte, l’utilisation d’une méthode à la fois synthétique et déductive, la présence constante des grandes thèses de la métaphysique scotiste, sans oublier la maîtresse pièce constituée par l’analyse et la dynamique de l’ordre essentiel (ordo essentialis). Les deux premiers chapitres éclairent l’armature de la métaphysique telle que la conçoit Duns Scot, habillée de son appareil technique savant, précis et déroutant à la fois. A son contact, le lecteur contemporain fera le long apprentissage du métier de penser ce-qui-est et particulièrement cette région de l’être si difficile à cerner dans son statut intermédiaire, que le Docteur Subtil appelle lui-même le possible-réel.
Au cœur même d’une telle métaphysique se dessine une construction intellectuelle, que bien des penseurs de ce XIVe siècle naissant ne manqueront de retenir: il s’agit de l’analyse de la causalité et de ses modes. Je voudrais considérer ici quelques aspects des relations qu’entretiennent les causes finale et efficiente, à la lumière de l’opuscule de Duns Scot.