Assez généralement, le livre de Qohéleth (l’Ecclesiaste) est considéré comme le document d’une profonde «crise de la sagesse» : son auteur ne pouvait plus partager les idées de la sagesse primitive, authentique. Pourtant cette compréhension dépend de l’image qu’on a de ce qui constitue l’essentiel de la «sagesse». Une reconsidération des phénomènes «sapientiaux» amène à définir la «sagesse» non pas en fonction des critères du contenu (par exemple, évaluation optimiste de l’ordre du monde), mais plutôt par son procédé argumentatif. Cette autre définition permet une comparaison entre des cultures aussi différentes que celles des Sumériens (IIIe mill.), des Juifs (חכמה) et des Grecs (σοφία). Le livre de Qohéleth représente alors une pensée qui reste rigoureusement dans la ligne de la «sagesse» – en l’appliquant dans unesituation de «crise» : il est le document d’une «sagesse de la crise».