La bibliothèque copte découverte en 1945-1946 près de Nag Hammadi dans la vallée du Nil, bibliothèque formée de douze ou treize volumes réunissant entre cinquante-cinq et soixante traités philosophiques et religieux, ne cesse de poser des questions de toutes sortes: interprétation du détail, sens de tel texte, signification générale de l’ensemble et problème de son insertion historique. S’il est certain que la plupart des traités représentent la tendance religieuse qu’il est convenu, à la suite des Pères chrétiens polémistes, d’appeler « gnostique », il est tout aussi certain que l’éventail des doctrines exposées est assez vaste. A côté d’un fragment de Platon (République 588B-589B), on trouve des textes de l’école dite « hermétique », et à côté de l’Evangile de Thomas dont la teneur est relativement proche de celle des évangiles canoniques, on trouve l’Evangile selon Philippe qui est l’un des textes les plus outrageusement « gnostiques » qu’on puisse imaginer. Deux faits bien précis viennent encore compliquer la situation: dans la reliure de l’un des volumes (le codex VII), on a découvert (à côté d’un document daté de 339 ou 342) un fragment d’une lettre adressée à Pachôme, le fondateur des monastères cénobitiques égyptiens; de plus un passage assez important du traité intitule « Les enseignements de Silvanos » (NHC VII, 4) a été repéré dans un texte que la tradition chrétienne attribue à Antoine le Grand, le célèbre anachorète chrétien (Guillaumont, 1977, p. 329 s.). Qui a constitué un tel recueil, si éclectique ou hétéroclite? Qui en était le propriétaire? Et, vu la diversité des doctrines exposées, comment interpréter tel morceau apparemment ambigu?